
Mohamed Regragui, coach auprès de sportifs de haut niveau (ici en compagnie de David Beckham, ex-PSG).
Quelle est la place du mental dans les résultats sportifs des athlètes de haut niveau ?
Mohamed Regragui : Le mental, c’est 70 % de la performance finale. On peut être à 200 % physiquement et ne pas être bon car, dans la tête, cela ne suit pas. Dans le footbal, les exemples sont légion. Les équipes réduites à 10 après une expulsion s’imposent parfois face à 11 joueurs. Cela n’est dû qu’à des facteurs psychologiques. Cela situe l’importance du mental, et les problématiques qui peuvent en découler.
En quoi l’accompagnement mental est-il si important ?
Il est indispensable. Le football est le sport où il y a le plus de besoins parce que les sommes en jeu sont importantes, et souvent les joueurs ont des baisses de régime du fait de l’environnement ou de leur rapport à l’argent.
Vous avez travaill avec des footballeurs professionnels comme Jérémie Janot, Ousmane Dabo ou Kévin Anin ; en quoi l’hypnose a-t-elle été utile ?
Pour Ousmane Dabo, je suis intervenu dans le deuil qu’il a dû faire de sa fin de carrière. Avec Jérémie Janot, on a travaillé sur la confiance, c’est un gros stressé, et Kevin Anin, il était dans une quête de soi-même. Je ne fais pas tout le travail, ce n’est jamais grâce à moi, ce sont les ressources de chaque personne qui font qu’elle avance. L’hypnose comprend plusieurs méthodes, ce n’est pas forcément comme on peut se l’imaginer, et cela peut être simplement conversationnel.
Montrés du doigt, les comportements des entourages peuvent-ils influer sur le mental du sportif ?
Souvent, quand le sportif acquiert de la notoriété, on imagine que ce sont les potes ou ceux qu’on appelle les nouveaux amis qui sont les plus néfastes. Mais l’environnemesnt familial peut l’être également : un père omniprésent par rapport aux gains du joueur ; les frères qui galèrent un peu… autant d’étapes de vie difficiles. Et puis les joueurs gagnent beaucoup d’argent, mais ils en prêtent aussi. Je suis ami avec Zoumana Camara (défenseur du PSG), il a toujours été aux petits soins avec sa famille.
La France a été traumatisée par le fiasco du Mondial 2010. En termes de valeurs, les jeunes footballeurs originaires de banlieue ont été visés, qu’en pensez-vous ?
Les éducateurs du football n’avaient pas vu venir le phénomène. Cette nouvelle génération a d’autres valeurs, elle n’en a parfois plus du tout. À une autre échelle, cela pourrait se reproduire comme au sein de clubs par exemple. Quand un jeune de centre de formation gagne 7 000 € et qu’il sait que son professeur n’en gagne que 1 200, il est difficile de garder les pieds sur terre. Cependant, le travail est aussi à faire avec les entourages, et notamment les parents. Depuis le Mondial 98, ils vivent dans un rêve. À l’époque, j’étais éducateur de poussins au Racing 92, j’avais vu des parents venir me me demander si leur gamin pouvait devenir Zidane…
Quelles sont les solutions ?
L’accompagnement mental est indispensable. Un club comme Sochaux l’utilise déjà, à Lorient aussi, et cela existera de plus en plus, car les éducateurs en place ont une autre manière de travailler. Et le nerf de la guerre, ce sont les codes de communication qu’il manque pour échanger avec certains jeunes. Il faut faire du cas par cas, car chaque individu est diffé- rent. Il y a des personnes qui marchent à l’affect, d’autres ont besoin de communication…
Avez-vous été approché par des clubs ou des fédérations ?
Oui, j’ai rencontré Noël Le Graët, le président de la Fédération française de football (FFF), ainsi que Willy Sagnol, entraîneur de l’équipe de France Espoir, eux souhaitaient que j’établisse un plan pour travailler avec la direction technique nationale (DTN). J’ai aussi rencontré le président de l’OM Vincent Labrune et, fin juillet, j’ai vu José Anigo, le directeur sportif de l’OM ; il a été très réceptif, c’est en cours.