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Montpellier : La mosquée Averroès s’installe à La Paillade



Montpellier, ville estudiantine par excellence et terre d’immigration, aux portes de la Méditerranée, connaît une forte population issue de l’immigration, notamment de confession musulmane. Située au nord-ouest de Montpellier, dans le quartier de La Paillade-Mosson, ouverte en septembre 2004, la mosquée Averroès est le plus récent lieu de culte musulman de la ville.


© France Keyser
© France Keyser
Deux hommes marquent l’histoire et l’empreinte de cette mosquée : Lhoussine Tahiri, responsable de l’Association des Franco-Marocains, en charge de la gestion, et Mohamed Khattabi, imam, chargé de l’éducation religieuse et des relations avec les fidèles. La grande salle de prière, composée d’une mezzanine qui accueille les femmes, est le centre du lieu vers lequel les fidèles convergent. L’espace est ouvert sur plusieurs cours attenantes, dont l’une d’elles doit bientôt accueillir une fontaine destinée aux ablutions, tout droit venue de Fès. La faïence, tout autour de la salle, vient appuyer et confirmer les influences marocaines de l’édifice. Le jumelage entre la ville de Fès et Montpellier depuis 2003 est passé par là. La mosquée prévoit en effet de renforcer cette collaboration, notamment par un échange culturel à destination des jeunes du quartier, avec en ligne de mire l’université Al-Quaraouiyine. 

La mosquée Averroès – du nom latin attribué au médecin et philosophe Ibn Rushd (1126-1198), célèbre commentateur d’Aristote – n’en reste pas moins française. L’imam Khattabi est l’un des rares imams de la ville à s’exprimer en arabe et en français dans ses prêches et ses discours. « Toute personne prédicatrice qui veut exercer doit parler la langue du pays. Parler en français n’est pas un choix, c’est une obligation », insiste Mohamed Khattabi. La mosquée souhaite s’inscrire pleinement dans le paysage français. Elle ouvre ses portes plusieurs fois durant l’année aux lycées et collèges qui souhaitent découvrir les lieux et mieux connaître l’islam.

Amitié et charte judéo-musulmane
 
Le dialogue interreligieux, aujourd’hui indispensable pour une pleine reconnaissance, est un volet impulsé depuis 4 ans. Lors de chaque fête de l’Aïd sont présents les dignitaires religieux chrétiens, juifs et protestants de la ville. Le bus de l’amitié judéomusulmane passe chaque année au sein de la mosquée pour une journée de rencontre et de partage. Une charte commune judéo-musulmane sur la gestion de la mort dans les deux religions est en projet, à destination des personnels des maisons de retraite de la ville. 

Un pôle de solidarité s’est constitué naturellement dans la mosquée. Pendant le mois de ramadan, un repas destiné aux démunis est organisé au moment de la rupture du jeûne. En 2008, 200 personnes ont pu en bénéficier chaque soir. Des collectes sont organisées pour faire face aux difficultés de la vie de certains fidèles. En octobre dernier, à l’occasion de la prière mortuaire d’une femme  enceinte décédée à la suite d’un accident, qui n’avait pas de famille ni de ressources, la mosquée a décidé d’avancer 1 500 euros pour son enterrement au carré musulman de Gramont. Plus généralement, c’est grâce à la générosité des fidèles que la mosquée est aujourd’hui entretenue. À l’entrée et à l’intérieur de la mosquée sont affichés des tableaux de dépenses en toute transparence.

Une mosquée en devenir

La mosquée Averroès est reconnue officiellement non pas en tant que mosquée, mais comme salle polyvalente, construite et louée par la mairie.

Le 28 janvier 2002, le conseil municipal prend la décision de construire « une salle polyvalente à caractère associatif ». Le bâtiment sera loué à l’Association des Franco-Marocains, qui donnera naissance en 2004 à la mosquée Averroès. En 2006, le tribunal administratif annule cette décision pour cause de non respect du principe de laïcité. Le président de l’association, Lhoussine Tahiri, regrette que cette mosquée ait été construite dans ces conditions mais, à l’époque, il devenait indispensable d’ouvrir une mosquée pour les Montpelliérains. À ce jour, il existe plusieurs petites salles de prière, une mosquée dans le quartier du Plan Cabanes et une salle polyvalente dans le quartier du Petit Bard attribuée, elle aussi, par la mairie à une association musulmane de la ville. Face à ce jugement, l’Association des Franco-Marocains est en attente. Elle souhaite que les fidèles puissent racheter les lieux à la mairie afin que ceux-ci deviennent pleinement la mosquée des citoyens musulmans de la ville.


Une cité historique en Méditerranée Une ville, une mosquée
 
Entre deux rives. Capitale du Languedoc-Roussillon, au bord de la mer Méditerranée, Montpellier représente la 8e ville de France, qui connaît la plus forte croissance démographique. Dans cette ville universitaire de renom, un Montpelliérain sur quatre est un étudiant. La tradition universitaire remonte au Moyen Âge, avec la création de la première faculté de médecine en 1222. Jumelée à la communauté urbaine de Fès (Maroc) depuis 2003, Montpellier cultive des liens historiques avec les pays du pourtour méditerranéen. Les centres hospitaliers universitaires Hassan-II de Fès et Montpellier ont signé une convention de coopération en matière de santé. En 2008, une délégation d’associations de sourds de Fès a été accueillie par l’Association générale de sourds Montpellier région pour un stage de langues de signes. Une visite qui tend à favoriser la « solidarité méditerranéenne ». 

© France Keyser
© France Keyser
Des musulmans à Montpellier, au XIIe siècle

Au coeur de la vieille ville, au musée de la Société d’archéologie, vous découvrirez les rares traces existantes de la présence musulmane à Montpellier, au Moyen Âge.

Patrimoine. Deux fragments de stèles funéraires et une stèle quasi intacte ornent la première salle du musée. Les inscriptions coufiques (anciens caractères arabes employés à Koufa, en Irak, d’où leur nom) qui y figurent nous apprennent qu’il s’agit de la tombe d’un jeune homme appelé Ibn Ayyûb. Il était étudiant. Sa discipline était la science des traditions et leur interprétation selon le rite malékite. La stèle contient aussi quelques vers écrits à la mémoire de ce jeune tâlib. Ces stèles ont été retrouvées par hasard, en creusant le sol pour établir un conduit souterrain en 1891-1892 et, en 1965, lors de la démolition d’un îlot insalubre au faubourg de Nîmes, à proximité d’un très ancien cimetière.

La date de la mort nous indique que ces stèles datent du XIIe siècle.Cette communauté musulmane est issue du début du XIe siècle de la venue des marchands arabes d’Andalousie et d’Afrique du Nord. Selon l’historien Muslim Charafdine, auteur d’une thèse sur le patrimoine musulman en France au Moyen Âge, « il a fallu au moins deux générations pour passer du stade de marchands itinérants […] au stade d’une communauté qui a pris place dans le paysage socio-économique de Montpellier. […] Preuve d’une installation durable, ces écoles assuraient aux générations successives une formation religieuse. »
 


Repères
1986 : l’évêché, au nom de l’Église, loue une salle aux musulmans, qui fera office de mosquée pendant 20 ans. C’est la première mosquée de Montpellier.
4 septembre 2004 : ouverture de la mosquée Averroès.
Superficie : 2 030 m2.
250 élèves, de 6 à 15 ans, inscrits aux cours d’arabe, les mercredis, samedis et dimanches.
Entre 1 800 et 2 000 fidèles, chaque vendredi.
12 000 personnes pour la prière de l’Aïd, au stade de la Mosson, à Montpellier.

© France Keyser
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Portrait

Mohamed Khattabi est un jeune imam de 47 ans. Né à Casablanca, dès son plus jeune âge, il est baigné dans l’univers de la religion et de la spiritualité musulmane. En 1981, il poursuit ses études de mathématiques au Canada. Attiré par les sciences islamiques, il parcourt les États- Unis auprès de maîtres religieux qui lui permettent d’approfondir son savoir.
Le destin le mènera ensuite en Europe. Un temps imam en Hollande, il est contacté par une association  pour être imam en France en 1995.
D’Escaudain à Nîmes, en passant par Tourcoing et Cannes, Mohamed Khattabi sera salarié de plusieurs associations en tant qu’éducateur religieux. Depuis 4 ans, il exerce sa fonction d’imam à la mosquée Averroès de Montpellier, où il est connu pour ses discours en français, proches de la jeunesse.

Reportage de Jehan Lazrak-Toub le Lundi 3 Novembre 2008


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