La dernière sortie de Robert Ménard, maire de Béziers, sur l’usage des statistiques ethniques révèle une fois encore l’obsession de la « question musulmane » en France. Si on fait abstraction des idées frontistes que porte ce maire, sa naïveté déconcertante de croire qu’un prénom arabe peut être le marqueur de la confession musulmane nous a quelque peu fait sourire. Seulement, voilà que le fichage municipal de citoyens sur des critères religieux et ethniques nous renvoie à une histoire douloureuse, celle des juifs raflés sous Vichy. D’où la stupeur générale et la condamnation unanime.
Ce sont d’ailleurs ces dérives qui sont avancées pour contrecarrer ceux qui demandent pour la bonne cause l’usage de catégories ethniques afin de tracer les discriminations à l’oeuvre. Concernant l’accès à l’emploi, par exemple, l’appartenance religieuse peut être discriminante. Une étude (French-American Foundation, 2010) menée sur la base de testing de CV a montré qu’un musulman a 2,5 fois moins de chances d’être convoqué à un entretien de recrutement qu’un camarade chrétien. L’étude, outre le prénom musulman, a eu la précaution d’ajouter d’autres signaux (notamment les expériences bénévoles) pour identifier plus objectivement le marqueur musulman.
Face à une telle réalité où l’égalité républicaine est dangereusement piétinée, on devrait être plus pragmatique. Des préconisations destinées à encadrer ce type d’outils ont déjà été faites tels l’anonymat des échantillons, le volontariat ou même le fait de s’assurer que l’organisme en charge de l’étude ne soit jamais rattaché à l’administration publique, à l’entreprise, à la collectivité qui en fait la demande. Tout l’inverse de Ménard tant dans la méthode que dans ses intentions.