
© Lahcène Abib
Quelques pierres entourées d’herbes hautes l’attestent : bientôt se dressera ici la Grande Mosquée de Cergy. Deux panneaux imposants de part et d’autre du terrain, situé dans les Hauts-de-Cergy, complètent l’information délivrée aux riverains. Parmi ces derniers, quelques-uns ne cachent pas leur mécontentement : ils craignent les problèmes de stationnement et les nuisances sonores ; mais la majorité jubile. « Vingt ans que les fidèles n’attendaient que cela », s’exclame Hamida Maïga, président de la Fédération musulmane.
Une situation provisoire qui dure
Mais les musulmans de la ville veulent leur propre lieu de culte. « On en a assez de ce bricolage, c’est du provisoire qui dure. On en ressent les limites lors des grandes fêtes rituelles », s’indigne Mohamed, un jeune Cergyssois. « Je viens chaque semaine pour prier et, à chaque fois, je me dis la même chose : notre communauté est très mal structurée, c’est pour cela que les travaux traînent ! Il aurait fallu réfléchir à leur financement bien avant de les démarrer… »
Mais les musulmans de la ville veulent leur propre lieu de culte. « On en a assez de ce bricolage, c’est du provisoire qui dure. On en ressent les limites lors des grandes fêtes rituelles », s’indigne Mohamed, un jeune Cergyssois. « Je viens chaque semaine pour prier et, à chaque fois, je me dis la même chose : notre communauté est très mal structurée, c’est pour cela que les travaux traînent ! Il aurait fallu réfléchir à leur financement bien avant de les démarrer… »
« La nécessité d’un lieu de culte musulman était martelée depuis plusieurs années par les responsables de la communauté musulmane de Cergy, dont certaines ont plus de vingt ans d’existence », s’insurge Hamida Maïga. « Elles se sont beaucoup impliquées dans l’organisation des fêtes musulmanes mais aussi dans l’enseignement et la connaissance de l’islam. Il n’est pas normal qu’elles ne disposent pas de vrais lieux de culte. Les autres religions n’ont pas ce problème. »
Une injustice qui a interpellé Dominique Lefebvre, maire de Cergy-Pontoise : « J’ai toujours défendu l’idée d’une mosquée. » Il s’est donc engagé, lors du conseil municipal de décembre 2002, à accompagner la communauté musulmane dans la construction d’un lieu de culte décent. Pour assurer la réussite de ce projet, il a invité celle-ci à « se doter d’une instance représentative de sa diversité, que cela soit en termes de nationalités ou de pratiques religieuses » et proposé la mise en place d’un conseil des religions, qui regroupe les représentants des différentes communautés religieuses de Cergy.
Une injustice qui a interpellé Dominique Lefebvre, maire de Cergy-Pontoise : « J’ai toujours défendu l’idée d’une mosquée. » Il s’est donc engagé, lors du conseil municipal de décembre 2002, à accompagner la communauté musulmane dans la construction d’un lieu de culte décent. Pour assurer la réussite de ce projet, il a invité celle-ci à « se doter d’une instance représentative de sa diversité, que cela soit en termes de nationalités ou de pratiques religieuses » et proposé la mise en place d’un conseil des religions, qui regroupe les représentants des différentes communautés religieuses de Cergy.

Maiga Hamida (à dr.), président de la Fédération musulmane de Cergy, et M. Tajudeen © Lahcène Abib
Une charte et une fédération
Une recommandation entendue par les présidents des dix associations musulmanes de la ville, qui se dotent, en avril 2003, d’une charte. « Elle pose un cadre et des principes de fonctionnement et permet en même temps d’unir nos efforts autour de différents projets, dont le plus important est la construction d’une mosquée », explique Hamida Maïga.
Quelques mois plus tard, en juin 2003, les associations franchissent un nouveau pas et créent la Fédération musulmane de Cergy (FMC), une association cultuelle (loi de 1905). Elle a pour mission de mener à bien la réalisation du projet d’une Grande Mosquée. En 2004, la FMC lance une consultation auprès d’architectes : c’est l’architecte de renom Franck Hammoutène qui est retenu. Une étape supplémentaire est franchie le 29 septembre 2005, lorsque le conseil municipal de Cergy autorise le maire à signer un bail emphytéotique d’un terrain de plus de 2 000 m2. Un terrain, un architecte, c’est l’aboutissement en apparence.
Mais trois ans s’écoulent sans qu’une seule pierre soit posée : les difficultés financières ne tardent pas à mettre le projet en péril. Celles-ci conduisent, en janvier 2008, à l’abandon du projet architectural de Franck Hammoutène, jugé trop onéreux. En avril 2008, la FMC sollicite l’avis de l’ensemble des Cergyssois sur différentes maquettes, c’est celle de Jimmy Skalli qui fait l’unanimité. Le 21 juin 2009, dans une ambiance festive, a lieu enfin la pose de la première pierre : la Grande Mosquée de Cergy devrait sortir de terre avant fin 2010. Un dossier pour lequel le maire a promis toute son attention : « Je surveille l’avancée des travaux, j’espère sincèrement que les musulmans de Cergy pourront y prier pour les prochaines fêtes ! » Affaire à suivre…
Mais trois ans s’écoulent sans qu’une seule pierre soit posée : les difficultés financières ne tardent pas à mettre le projet en péril. Celles-ci conduisent, en janvier 2008, à l’abandon du projet architectural de Franck Hammoutène, jugé trop onéreux. En avril 2008, la FMC sollicite l’avis de l’ensemble des Cergyssois sur différentes maquettes, c’est celle de Jimmy Skalli qui fait l’unanimité. Le 21 juin 2009, dans une ambiance festive, a lieu enfin la pose de la première pierre : la Grande Mosquée de Cergy devrait sortir de terre avant fin 2010. Un dossier pour lequel le maire a promis toute son attention : « Je surveille l’avancée des travaux, j’espère sincèrement que les musulmans de Cergy pourront y prier pour les prochaines fêtes ! » Affaire à suivre…
CERGY, C'EST LA VIE !
Ville nouvelle. Situé dans le Val-d’Oise (95) à environ 20 km de Paris, Cergy est né de la rencontre d’un village vieux de plusieurs siècles et de l’aventure des villes nouvelles. Aujourd’hui, centre administratif important (tribunal administratif, préfecture, conseil général), Cergy est aussi un pôle économique fort. Politiquement, la commune est de gauche, et administrée par le socialiste Dominique Lefebvre depuis 1996. La ville compte de plus de 55 600 habitants, dont près de la moitié de la population a moins de 25 ans. Une population jeune attirée par les grandes écoles ESSEC, ENSEA, le campus universitaire et l’IUFM. Chaque été, la base de loisirs de Cergy-Neuville draine des milliers de visiteurs séduits par les étangs artificiels formés à partir d’anciennes sablières. Le 27 septembre, le maire inaugurait le stade Salif-Keita, « reflet de l’identité plurielle présente sur le territoire cergypontain ».

Inauguration du stade Salif-Keita, le 27 septembre, en présence du premier Ballon d’or africain Salif Keïta et du maire Dominique Lefebvre. © Lionel Pagès
SORTIR L’ISLAM DES CAVES !
Le 21 juin a marqué la pose de la première pierre, véritable coup d’envoi de la future Grande Mosquée, en présence de 800 personnes, dont plusieurs officiels et dignitaires d’autres religions. Le maire Dominique Lefebvre répond à nos questions.
Pourquoi avoir accompagné le projet de construction d’une mosquée alors que tant d’élus se défilent ?
J’ai toujours soutenu et accompagné l’idée d’un lieu de culte musulman car toutes les autres religions disposaient de lieux propres. La République garantit la libre pratique religieuse, j’ai donc voulu aider la communauté musulmane à se doter d’une mosquée comme en son temps la ville nouvelle avait aidé à la construction d’une église, place Nautilius.
J’ai toujours soutenu et accompagné l’idée d’un lieu de culte musulman car toutes les autres religions disposaient de lieux propres. La République garantit la libre pratique religieuse, j’ai donc voulu aider la communauté musulmane à se doter d’une mosquée comme en son temps la ville nouvelle avait aidé à la construction d’une église, place Nautilius.
N’avez-vous pas craint la réaction des Cergyssois ? Certains vous accusent même de draguer le vote musulman ?
Le débat a été posé avant les élections municipales. Nous avions été interpellés en 1995 à la LCR de la Croix-Petit. Il y a déjà plus de quinze ans… Il était donc temps de prendre le dossier à bras-le-corps. Il m’a semblé aussi que c’était une réponse adaptée au « choc des civilisations » né du 11-Septembre. Dans ce climat de stigmatisation, j’ai voulu faire un geste envers la communauté musulmane de Cergy. Je ne vous cache pas qu’il y a eu plusieurs débats en conseil municipal.
Pourquoi avoir choisi comme emplacement les Hauts-de-Cergy ?
C’est un choix que l’opposition a contesté, elle imaginait la mosquée dans les quartiers plus populaires comme la Croix-Petit, Saint-Christophe… Ce que j’ai formellement refusé ! Il n’y a pas de quartier juif, musulman, catholique. Je ne veux pas que l’on communautarise les quartiers ou plutôt un quartier. Le terrain choisi est facilement accessible par les transports en commun, assez vaste. C’est important pour éviter les dérives : il faut sortir l’islam des caves.
C’est un choix que l’opposition a contesté, elle imaginait la mosquée dans les quartiers plus populaires comme la Croix-Petit, Saint-Christophe… Ce que j’ai formellement refusé ! Il n’y a pas de quartier juif, musulman, catholique. Je ne veux pas que l’on communautarise les quartiers ou plutôt un quartier. Le terrain choisi est facilement accessible par les transports en commun, assez vaste. C’est important pour éviter les dérives : il faut sortir l’islam des caves.
Repères
• Capacité d’accueil : 1 500 personnes sur 3 niveaux
• Coût : 3 100 000 €.
• 20 décembre 2001 : création d’une commission de réflexion sur la construction d’un lieu de culte musulman à Cergy.
• 22 juin 2003 : naissance de la Fédération musulmane de Cergy (FMC) à la mairie.
• Début 2004 : la FMC lance une consultation auprès d’architectes pour la construction d’une Grande Mosquée.
• Septembre 2004 : adoption par la FMC du projet de l’architecte Franck Hammoutène.
• Septembre 2004 : adoption par la FMC du projet de l’architecte Franck Hammoutène.
• 29 septembre 2005 : le conseil municipal signe le bail emphytéotique d’un terrain de plus de 2 000 m².
• Avril 2008 : un nouvel architecte Jimmy Skalli est choisi.
• Mars 2009 : obtention du permis de construire.

© Lahcène Abib
Portrait
Nassif Aljibouri, 57 ans, est né et a grandi en Irak : « Je suis venu en France il y a vingt-neuf ans, pour finaliser ma formation d’ingénieur mécanique maritime. » Une fois titulaire du brevet d’études maritimes, il décide de repartir dans son pays avec l’idée d’apporter son savoir-faire. Quelques mois plus tard, il est à nouveau en France : « Je suis revenu avec le statut de réfugié politique », il ne retournera pas en Irak avant la chute du régime en 2003. Ce père de trois enfants avoue avoir connu des moments d’abattements mais avoir toujours trouvé refuge auprès de sa belle-famille algérienne : « Comme on ne pouvait pas aller en Irak, on allait chaque été en Algérie ». Il est depuis 1993 imam à Cergy et vice-président de l’ACMC (Association de la communauté musulmane de Cergy). Ses prêches pleins de tolérance, en arabe et en français, sont très appréciés par les fidèles.
Nassif Aljibouri, 57 ans, est né et a grandi en Irak : « Je suis venu en France il y a vingt-neuf ans, pour finaliser ma formation d’ingénieur mécanique maritime. » Une fois titulaire du brevet d’études maritimes, il décide de repartir dans son pays avec l’idée d’apporter son savoir-faire. Quelques mois plus tard, il est à nouveau en France : « Je suis revenu avec le statut de réfugié politique », il ne retournera pas en Irak avant la chute du régime en 2003. Ce père de trois enfants avoue avoir connu des moments d’abattements mais avoir toujours trouvé refuge auprès de sa belle-famille algérienne : « Comme on ne pouvait pas aller en Irak, on allait chaque été en Algérie ». Il est depuis 1993 imam à Cergy et vice-président de l’ACMC (Association de la communauté musulmane de Cergy). Ses prêches pleins de tolérance, en arabe et en français, sont très appréciés par les fidèles.